Léo Ferré – La Mémoire et la mer

Petites notes de lecture
Rawa-Marie Pichetto – texte initialement écrit en octobre 2014


    Il y a des textes qui nous happent, s’emparent de nous, nous envoûtent et nous possèdent.
Il en est ainsi de « La Mémoire et la mer »1 de Léo Ferré…

Un texte puissant. Il tape, il cogne comme une vague au bord de la mer, lorsque, assis, nous la recevons en plein corps…
J’écoute La Mémoire et la mer en boucle depuis des jours afin de pouvoir m’imprégner totalement du texte, un peu comme lorsque nous nous laissons aller sur le dos de la mer qui nous porte ; nous fermons les yeux et nous oublions la frontière physique entre notre corps et le corps de la mer…

Les images poétiques déferlent dans ce texte et sont d’une beauté frappante, tantôt par sa douceur, tantôt par la surprise des correspondances recherchées dans les images associées les unes aux autres selon une architecture propre au poète, évoquant des milliers et des milliers de mondes qui s’enlacent et se croisent…

J’aime beaucoup dans ce passage ce qu’on peut qualifier de « puissance » de la douceur et de la tendresse :
Je suis le fantôme jersey
Celui qui vient les soirs de frime
Te lancer la brume en baiser
Et te ramasser dans ses rimes

Comme le trémail de juillet
Où luisait le loup solitaire
Celui que je voyais briller
Aux doigts de sable de la terre

L’évocation que porte la brume en baiser est magnifique ainsi que sa suite : te ramasser dans ses rimes.

Tout au long du texte nous pouvons relever des « correspondances » métaphoriques parfois inattendues : géométrisant, vitrail, et mathématique bleue vers la fin du poème:
Une mathématique bleue,
Dans cette mer jamais étale
D’où me remonte peu à peu
Cette mémoire des étoiles
Le tout est porté par cette image de la mer qui finit par être « bergère », et son sable « bêle ».
Une association, surprenante à première vue, entre un élément liquide : la mer, et les références aux mathématiques et à l’architecture. Mais cette association donne au poème un univers très particulier et mystérieusement attirant.
Poème dense, d’une haute tension poétique, à lire, à relire et surtout à écouter par Léo Ferré.

photo Angelo Deligio
© Angelo Deligio / Leemage

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1- Cliquer pour lire le texte complet du poème.

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